Déplacement assumé

verticale
Au cours des années 1970, Barthes fait du corps le signifiant majeur, pouvant occuper la place de n’importe quel signifié. C’est le mot-vecteur, le mot-mana (il emprunte le terme à Mauss, non sans paradoxe puisque le mana, principe de pouvoir spirituel, est véhiculé par les revenants et les esprits), mot multiforme qu’il fait servir à tout. Le mot-mana n’est pas un mot chéri, qui, lui, peut devenir un fétiche, il remplace tout ce qu’il est difficile de nommer, l’atopie, le supplément, la dérive. Le mot « corps » se comprend ainsi dans une distance avec le corps propre, le corps à soi. Il permet dès lors d’éloigner et d’éparpiller le sujet, de ne pas faire du moi un centre ou le siège de la vérité. C’est dans cette compréhension d’une mobilité et d’une différence du corps qu’il faut approcher l’écriture personnelle de Barthes. Elle ne correspond pas à un tournant autobiographique ni à la saisie d’un sujet plein (la subjectivité reste une question très éloignée de son œuvre), mais à un déplacement assumé de l’écriture du côté des investissements du désir, qui sont autant de manière de projeter le corps.
Éloignement du politique, moindre investissement dans la théorie l’époque est pour Barthes au recentrement. Partir de soi pour aller vers le monde et les autres se présente comme une nouvelle orientation, plus en phase avec le désir d’écrire. p.513

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